Lutte contre la corruption : le REN-LAC s’inquiète de l’aveu d’impuissance au sommet l’Etat
Le Réseau national de Lutte anti-corruption (REN-LAC) a rencontré le chef de l’Etat burkinabé le 27 mars dernier pour lui transmettre officiellement un mémorandum d’interpellation sur l’absence d’une volonté politique réelle de lutter contre la corruption au sommet de l’Etat.
La décision d’interpeller le chef de l’Etat à travers un mémorandum a été prise lors de la double commémoration de la 12e édition des journées nationales de refus de la corruption (JNRC) et du 20e anniversaire du REN-LAC tenues en décembre 2017, ont indiqué les responsables du Réseau lors d’un point de presse ce mercredi 11 avril.
Selon le Dr Claude Wetta, Secrétaire exécutif de la structure, les échanges avec le Président du Faso ont porté essentiellement sur deux points : la nécessité d’agir urgemment contre l’impunité et la mise en œuvre les réformes institutionnelles et législatives opérée à la faveur de l’historique insurrection populaire d’octobre 2014.
Au cours des échanges, le Réseau a exprimé avec force au Chef de l’Etat « son insatisfaction et ses inquiétudes quant à sa volonté et à son engagement dans la lutte contre la corruption au Burkina Faso. » Il en veut pour preuve les nombreuses dénonciations de cas de corruption dans la presse qui semblent laisser l’exécutif dans une indifférence totale, frisant une certaine complicité au sommet de l’Etat. Les dernières révélations sur des pratiques de monnayage d’audience dans le proche entourage du Président du Faso lui-même et dans certains ministères, sans qu’aucun éclairage n’ait été apporté à l’opinion, sont illustratives de cet état de fait.
De fait, le Réseau déplore que sur le pan administratif, les malversations ne donnent pas systématiquement lieu à des poursuites disciplinaires, ni au recouvrement des sommes détournées. Claude Wetta et son équipe s’inquiètent en outre de la remise en cause de la désignation des directeurs généraux des structures d’Etat par voie de recrutement et sur appel à candidature. Ce qui n’augure pas, selon eux, de bonnes perspectives pour la lutte contre la corruption.
Un aveu d’impuissance
En réponse à ces inquiétudes, « le Chef de l’Etat qui a confié être en parfait accord avec le REN-LAC a insisté sur la nécessité que chaque acteur joue son rôle », souligne Claude Wetta. Ainsi, sur la question des détournements dans l’administration publique, tout en rappelant les actions qu’il aurait envisagées et qui se seraient butées aux exigences de l’Etat de droit, le chef de l’Etat a invité le REN-LAC à orienter ses actions vers les syndicats qui refuseraient de participer à la mise en place des conseils de discipline dans les ministères.
Pour que cesse l’impunité, Roch Marc Christian Kaboré souhaite que chaque acteur joue son rôle. Rappelant au passage, les efforts d’amélioration du traitement des magistrats, il affirme ne pas comprendre que les choses restent en l’état du côté de la justice.
A l’analyse, le REN-LAC estime qu’il y a à travers ces propos du chef de l’Etat un aveu d’impuissance face à un fléau aussi grave que la corruption. « Bien évidemment, pour que la corruption recule dans notre pays, il faut un changement des mentalités à tous les niveaux. Mais au Burkina Faso, contrairement à beaucoup pays africains, l’ASCE-LC et le REN-LAC existent, la loi anti-corruption et ses textes d’application, etc., sont en vigueur, offrant au chef de l’Etat des atouts incommensurables », a fait savoir, Claude Wetta, le Secrétaire exécutif du REN-LAC. Selon lui, il faut seulement en plus de cet arsenal qu’une dynamique saine soit impulsée depuis le sommet de l’Etat, pour faire reculer la corruption. « Ailleurs comme au Rwanda, c’est le chef de l’Etat lui-même qui incarne la ferme volonté de combattre le fléau et d’engranger des résultats forts appréciables », soutient-il.
En attendant, le REN-LAC s’inquiète du fait que jusqu’à présent les autorités n’ont pas encore indiqué la voie à suivre pour une gouvernance vertueuse dans notre pays. Le Réseau s’appuie sur la promotion de personnes qui jouissent de hautes responsabilités, alors même qu’elles seraient trempées dans des malversations.