Valeurs Morales Ethiques et Civiques (MEC) : « l’argent roi tend manifestement à imposer sa loi à tout et à tous ».
Le BURKINA FASO, « pays des hommes intègres » a beaucoup changé. Tous les observateurs sont unanimes sur ce point. Les valeurs dont nous nous vantions jadis ont évolué, mais pas dans le bon sens. En effet, en quelques décennies la faillite morale a pris le visage de la corruption qui gangrène tout le corps social menacé désormais dans sa propre existence, du fait de la défaillance générale de nos élites dirigeantes. C’est dans ce cadre que le REN-LAC a mené une étude sur le rôle des valeurs Morales éthiques et civiques (MEC) pour mieux orienter la lutte contre la corruption.
Pour 87,5% de la population enquêtée, les Burkinabé sont de plus en plus corrompus. En effet « La société Burkinabé actuelle n’a plus de valeur…la seule chose qui compte c’est l’argent ». C’est la pensée générale qui se dégage de cette étude. Les valeurs religieuses tendent à s’effriter tandis que les valeurs individualistes prennent du terrain. L’argent roi tend manifestement à imposer sa loi à toutes et à tous.
Sur un classement par ordre d’importance de 18 valeurs essentielles qui constituent le socle de la société Burkinabé, il ressort que l’intégrité occupe le 12ème rang. Les premières places sont occupées respectivement par la sécurité, la justice, le travail, la liberté. Des notions qui sous leur acception moderne peuvent traduire subtilement un glissement vers des valeurs plus individualistes par rapport aux valeurs de notre société traditionnelle.
L’intérêt général, le sens de l’honneur, le respect des autres et le sens du devoir occupent respectivement les dernières places du classement, symbolisant également la perte vertigineuse de nos valeurs traditionnelles.
Selon, l’étude sur les valeurs MEC, la perte des valeurs au Burkina Faso a débuté relativement dans les années 1990, c’est-à-dire avec la libéralisation de notre économie. Elle a culminé en crise des valeurs, ressentie lors de la crise de 2011 pour ne prendre que ces quelques repères.
Les causes sont aussi bien endogènes qu’exogènes. Le contact direct avec les sociétés étrangères et l’influence du colonisateur ont créé concomitamment un pluralisme des valeurs.
En 2011, les autorités ont établi un lien direct entre la crise et le manque d’éducation civique et morale des jeunes. Or, selon l’étude, c’était oublier la faillite morale et le dérèglement incivique et antisocial des adultes et de l’élite dirigeante.
Réhabiliter l’intégrité au plus vite !
La réhabilitation de l’intégrité passe nécessairement par le renforcement de l’efficacité des mesures répressives, la révolte contre les méfaits de nos comportements amoraux, le respect de la valeur humaine, le renforcement de l’unité nationale, la promotion et l’enseignement des valeurs partagées. Mais l’étude a surtout insisté sur l’urgence de promouvoir l’idéal d’intégrité. Ce challenge requiert la mobilisation de plusieurs acteurs à différents niveaux. Il est donc recommandé au REN-LAC, la poursuite de la sensibilisation, l’intégration de la lutte contre la corruption dans les programmes éducatifs, la veille citoyenne et la promotion ou la valorisation des valeurs.
A l’intention des acteurs institutionnels (Gouvernement, Assemblée nationale…), il est recommandé la réalisation d’un module d’éducation aux valeurs dans la perspective de la lutte contre la corruption, un projet qui nécessitera l’implication des acteurs directs de l’éducation. Le point d’ancrage du module sera naturellement les programmes d’éducation civique existants.
Les valeurs morales, éthiques et civiques sont enseignées mais les enseignements ne sont pas orientés pour amener les élèves à lutter contre la corruption. Des suggestions de supports de communication sont faites dans l’étude. Une éducation aux valeurs sera d’autant plus efficace qu’elle se fera sur la base de supports qui suscitent l’intérêt des élèves et contribuent à façonner leur imaginaire.
En plus des supports habituels, les enseignants devraient être encouragés à utiliser les supports tels que les diaporamas, les CD-ROM (audio et vidéo), les dépliants, les bandes dessinées, les pin’s et les plates-formes e-learning.
La lutte anti-corruption passe par l’efficacité des appareils répressifs d’Etat, mais aussi par la résistance éthique du citoyen car « l’intégrité est une valeur cardinale…quand elle n’existe plus, la porte est grandement ouverte au désordre et aux injustices…» Dans un contexte de mondialisation impitoyable pour les nations qui ne savent pas où elles doivent aller, il est impératif que les efforts de tous soient conjugués pour une renaissance morale du Burkina Faso désormais sous tous les projecteurs.
Le Secrétariat exécutif