Lutte contre la mal gouvernance au Burkina Faso : Le manque d’exemplarité de l’Exécutif
Dans son rapport 2019[1] sur l’état de la corruption au Burkina Faso rendu public le 09 octobre 2020, le REN-LAC dénonçait la perception de salaires indues par plusieurs ministres du président Kaboré en violation du décret N°2008-891/PRES/PM/MEF du 31 décembre 2008 portant rémunération du Premier ministre, des Présidents d’institutions et des membres du Gouvernement par plusieurs ministres. Et concluait à un manque d’exemplarité au sommet de l’État en matière de lutte contre la corruption et d’assainissement des finances publiques. Ci-dessous l’intégralité de la position développée par le REN-LAC à l’époque.
Au cours de l’année 2019, des ministres ont continué de percevoir une rémunération en violation du décret n°2008-891/PRES/PM/MEF du 31 décembre 2008 portant rémunération du Premier ministre, des Présidents d’institutions et des membres du Gouvernement publié au Journal officiel n°06 du 05 février 2009. En effet, l’article 1er dudit décret fixe la rémunération brute des membres du gouvernement ainsi que les indemnités qui leurs sont dues. L’article 2 dudit décret dispose que toutes les hautes personnalités occupant les mêmes fonctions quels que soient leur provenance professionnelle et le niveau de rémunération antérieurement acquis, perçoivent une rémunération totale d’un million cent cinquante-cinq mille (1 155 000) F CFA. Il précise que la rémunération fera l’objet d’un contrat individuel entre l’État et chaque personnalité appelée aux hautes fonctions. Le contrat de chaque personnalité, conformément à la lettre et à l’esprit de l’article 2 ci-dessus visé du décret, devrait reprendre le montant de la rémunération fixée par ledit décret. La parade illégale trouvée et approuvée par le Président du Faso, c’est de faire signer des contrats avec un certain nombre de ministres et y inclure une clause relative au montant de la rémunération sans commune mesure avec les termes du décret.
Une vingtaine de ministres épinglés
Dans le gouvernement actuel formé le 24 janvier 2019, une vingtaine de ministres serait ainsi dans cette pratique de « se faire servir des salaires » en violation des textes en la matière. Les ministres provenant du privé et sous contrat avec une rémunération en violation du décret de 2008, sont entre autres, le ministre de la Communication et des Relations avec le Parlement, monsieur Remis Fulgance Dandjinou, le ministre des Infrastructures et du désenclavement, monsieur Éric Bougouma et le ministre de la Femme, de la solidarité nationale, de la famille et de l’action humanitaire, madame Hélène Marie Laurence Ilboudo Marchal. Les sommes trop perçues mensuelles pour cette catégorie sont de l’ordre de 1 465 225 pour madame Hélène Marie Laurence Ilboudo Marchal, de 1 350 000 pour monsieur Remis Fulgance Dandjinou et monsieur Éric Bougouma.
Une pratique répandue au-delà du Gouvernement
Au nombre des ministres qui sont sous contrat avec une rémunération plus élevée que celle du décret de 2008, il existe des agents publics de l’État. Il s’agit notamment du ministre de la Fonction publique, du travail et de la protection sociale, monsieur Séni Mahamoudou Ouédraogo, du ministre de l’Enseignement Supérieur, de la Recherche Scientifique et de l’Innovation (MESRSI), monsieur Alkassouom Maïga et du ministre de la Culture, des Arts et du Tourisme, monsieur Abdoul Karim Sango. Les sommes trop perçues mensuelles pour cette catégorie sont de l’ordre de 2 281 000 pour monsieur Alkassouom Maïga, de 2 256 000 pour monsieur Séni Mahamadou Ouédraogo et de 650 000 pour monsieur Abdoul Karim Sango. Au-delà des membres du gouvernement, la pratique est répandue dans les institutions. Ce comportement consistant à faire signer des contrats en violation d’un décret sur la rémunération des ministres tombe sous le coup de la mauvaise gestion des deniers publics, surtout dans un contexte où le gouvernement demande un « effort de guerre » aux agents publics.
[1] Page 52 et 53 du rapport